Les bases de données et la bédéphilie
Les communautés de fans et d’érudits dialoguaient déjà sur les réseaux numériques avant la démocratisation d’Internet, dans les écosystèmes fermés type America OnLine, ou sur des listes de diffusion. L’accès massif à Internet à partir du début du 21e siècle a cependant transformé ces pratiques bédéphiliques en permettant notamment la mise en commun de gigantesques bases de données, collaboratives ou institutionnelles.
L’exemple de BD Oubliées est parlant. Créé par Bernard Coulange en 1998 pour héberger des versions numérisées d’albums épuisés, le site comporte également un index partiel des numéros de Spirou, alimenté par l’auteur. Peu à peu, cet index s’enrichit de contributions extérieures, toujours suivies par Coulange. Le site répertorie ainsi gratuitement près de 120 revues, 24 000 numéros, avec couverture numérisée et sommaire, dans une forme tout simplement inimaginable sur papier.
Capture d'écran du site BD Oubliées, 2024
La Grand Comics Database (GCD), dérive quant à elle d’un projet collectif issu du fanzinat étatsunien. À partir de 1994, une petite équipe fondatrice met en commun ses index, d’abord sur disquettes, puis rapidement sur Internet. Au cours des années 2000, la base de données met en place des guides et un système de mentorat pour les contributions de volontaires, permettant une alimentation décentralisée. La GCD répertorie aujourd’hui un demi-million de numéros de bande dessinée dans de multiples langues, ajoutant descriptions factuelles et analyses historiques ou thématiques.
Capture d'écran du site Grand Comics Database, 2024
Ces bases proposent à leurs lecteurs et lectrices une connaissance experte, au grain très fin, aussi utile dans un parcours de curieux que dans un travail de recherche scientifique. Elles matérialisent aussi l’existence d’une communauté dispersée de bédéphiles et de fans, auto-régulée et ouverte, dont la puissance collective excède toute érudition individuelle.
Capture d'écran du site MediaBD, 2024
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