De Norbert Moutier aux fan comics

En 1953, le futur dessinateur de Valérian, Jean-Claude Mézières, alors âgé de 15 ans, envoie pourtant à Hergé une de ses créations mettant en scène un Tintin surmusclé. Le critique Norbert Moutier passe quant à lui son enfance, entre 1946 et 1960, à créer une impressionnante collection de bandes dessinées amateur reprenant les codes des fascicules populaires, jusque dans la présence de bulletins d’abonnements factices. Étape formatrice pour Mézières, passion secrète pour Norbert Moutier, la bande dessinée amateur constitue un dialogue intime avec des œuvres et avec le medium lui-même. Certaines de ces productions ont été retrouvées par hasard, exhumées par leur auteur ou rendues visibles par leur notoriété, mais l’essentiel en est resté invisible jusqu’au développement de l’usage d’Internet.

Nourries de contenus amateurs, des sites et plateformes comme DeviantArt, Tumblr, Instagram et bien d’autres ont en effet permis de rendre visible et découvrable cette bande dessinée non-professionnelle. Ces fan comics, utilisant désormais les mêmes outils de création et de diffusion que ceux des créatrices et créateurs professionnels, sont ainsi devenus un mode d’engagement hautement valorisé avec les séries populaires. Comme l’a montré le sociologue Sylvain Aquatias, les bédéphiles les plus jeunes sont aussi ceux qui pratiquent et revendiquent la création de bande dessinée amateur.