dans l’atelier de... marlene krause
[Juin 2018]
De Marlene Krause, on connaît en France l’album À un autre endroit édité par l’Association en 2013. Alors qu’elle travaille sur un prochain roman graphique, elle raconte son parcours, entre Hambourg et Barcelone...
Neuvième Art : Dans quelle région et quel milieu avez-vous grandi ?
Marlene Krause : Dans une ville située au milieu de la vallée de la Ruhr, une région très industrielle, reconstruite après la guerre et pour tout dire assez moche. Ma famille n’était pas composée d’artistes – même si ma grand-mère aimait dessiner et l’a souvent fait avec moi – : ma mère avait fait des études de mathématiques et mon père travaillait dans la chimie.
À quel moment votre vocation pour le dessin s’est-elle affirmée ?
Après que j’aie passé le bac, en fait. En Allemagne, il n’existe pas de filière arts plastiques au niveau du lycée. Je dessinais depuis toujours, j’aimais bien la bande dessinée, j’avais envie de m’orienter vers une activité artistique mais je n’avais pas d’idée très arrêtée. Quand j’ai commencé à me renseigner sur les enseignements de niveau universitaire qui pouvaient m’intéresser, je me suis rendu compte qu’il y avait peu d’écoles supérieures ou d’universités dans lesquelles on dessinait effectivement ; en général l’enseignement dispensé était surtout théorique, et le dessin n’est pas valorisé. Je me suis finalement présentée au concours d’entrée à l’université de Hambourg, où j’ai été admise et où j’ai accompli quatre ans d’études : une première année commune puis une spécialisation en illustration et bande dessinée. Certains étudiants se destinaient à l’illustration scientifique ou à l’illustration jeunesse. Puis j’ai encore fait une cinquième année, en 2009-2010, consacrée à l’achèvement de mon travail de fin d’études, qui était le manuscrit de l’album À un autre endroit.
où Marlene a étudié (photo X)
Quelles étaient vos références en matière de bandes dessinées ? Qu’aviez-vous lu ?
J’ai d’abord eu des goûts très classiques. Ma tante, qui venait chaque jour me chercher à la crèche quand j’étais petite, avait une étagère remplie de Lustige Taschenbücher, des histoires de Mickey et de Donald au format poche. J’arrivais plus ou moins à suivre les histories mais je ne savais pas encore lire ce qui était écrit dans les bulles. Je voyais bien quand Donald était en colère, mais je ne comprenais pas exactement pourquoi. C’est ce qui m’a poussé à vouloir apprendre à lire ! Par la suite, j’ai fréquenté la bibliothèque publique de ma ville où j’ai lu et emprunté pas mal de bandes dessinées. J’ai beaucoup aimé la série Yoko Tsuno, de Roger Leloup. Au point que, arrivant à Angoulême il y a quelques semaines, j’ai vu que la bibliothèque de la Cité avait deux albums de Yoko Tsuno que je ne connaissais pas et je n’ai pas pu m’empêcher de les emprunter. Ce qui me tenait éloignée de certaines bandes dessinées, comme la série Fix und Foxi, très populaire en Allemagne, c’était la violence. Ma grand-mère possédait un grand livre relié de Wilhelm Busch et m’avait fait découvrir ses histoires, mais j’avais été un peu horrifiée par la violence de Max und Moritz. Le Struwwelpeter de Hoffmann [1] aussi, je trouvais ça horrible. Quand j’étais lycéenne, je me suis initiée à une autre bande dessinée en découvrant les livres de Anke Feuchtenberger, Atak, Max Andersson...
À Hambourg, vous avez eu comme professeurs Anke Feuchtenberger [2] Stefano Ricci [3] et Martin tom Dieck [4]. Anke y enseigne depuis une vingtaine d’années et j’ai l’impression qu’elle a formé une partie importante des auteurs représentant la nouvelle bande dessinée allemande... En quoi consistait son enseignement ?
C’est un très grand professeur, je l’aimais beaucoup. J’ai toujours adoré son travail personnel mais elle n’en parlait jamais en cours. Si on le connaissait, c’était bien, mais elle-même ne le mettait pas du tout en avant et en aucun cas ne l’érigeait en modèle à imiter. En revanche elle amenait toutes sortes de livres en cours, pour nous les faire découvrir, nous exposer à des influences multiples (Stefano Ricci faisait de même). Elle nous encourageait aussi beaucoup à dessiner d’après nature, à nous efforcer de regarder le réel. Chaque semaine, quand nous nous rencontrions, nous devions lui apporter de nouveaux travaux.
Comme Français, je suis frappé par le fait que beaucoup de jeunes auteurs allemands, mais aussi scandinaves – je crois que c’est un trait commun à toute l’Europe du Nord – font leurs bandes dessinées au crayon et n’encrent pas leurs dessins. C’est beaucoup plus rare en France (et cela dénote immédiatement une « bande dessinée d’auteur »). Vous-même, tout comme Anke Feuchtenberger, vous travaillez au crayon. D’où cela vient-il ?
Je ne sais pas. J’ai toujours dessiné comme cela. Bien sûr, j’ai eu l’occasion d’essayer d’autres techniques, notamment dans les classes de dessin libre. Mais je préfère le crayon. En l’occurrence, c’est toujours un Faber Castell B. Peut-être que cette façon de faire est typique des dessinateurs qui ont fait les Beaux-Arts, qui ont une approche plus « artiste » de la bande dessinée...? Cela dit, ces dernières années, je scanne mes planches au crayon et les retravaille à l’ordinateur, notamment pour ajouter de la couleur. Cela change pas mal le résultat. Mais je n’aime pas passer trop de temps devant un ordinateur, je préfère dessiner, et avoir le contact du papier.
Vous êtes venue au Festival Angoulême pour la première fois en 2008, pour présenter la revue que vous aviez créée l’année précédente avec Martina Lenzin, Two Fast Colour, alors que vous étiez encore étudiantes. À quoi correspondait ce projet ?
Nous nous étions rencontrées à l’Université. Martina était Suisse mais elle avait fait son Erasmus à Hambourg et elle y est restée. Il y a eu quatre numéros de Two Fast Colour entre 2007 et 2011. Nous voulions faire un fanzine en sélectionnant les contributeurs de manière exigeante. Nous tirions à 250 exemplaires, avec une couverture en sérigraphie, et nous les vendions principalement dans les festivals.
Chaque numéro était centré sur un thème. Au sommaire, il y avait des amis à nous mais aussi des contributeurs internationaux. Certains sont un peu connus aujourd’hui, comme Anna Haifisch [5], Birgit Weyhe [6], Kati Rickenbach [7] ou Richard Short [8], qui habitait en Angleterre...
À un autre endroit a été publié par l’Association en 2013. Comment êtes-vous entrée en contact avec cet éditeur français ?
Alex Baladi avait vu une histoire que j’avais publiée dans Orang et m’a suggéré d’envoyer à l’Association un PDF de mon manuscrit. La réponse a été un peu longue à venir mais le livre a été accepté. J’en ai été très fière.
Il n’existe pas d’édition allemande de ce livre ?
Non. Comme les planches ont fait l’objet d’une exposition à Hambourg, j’en avais fait imprimer moi-même une soixantaine d’exemplaires, en tirage numérique, que j’ai vendus. Je n’ai pas vraiment cherché à faire publier ce livre par un éditeur allemand. Il faut dire qu’à cette époque, je n’étais plus très certaine que mon futur serait dans la bande dessinée. Je me rendais compte qu’il était difficile de ne faire aucun compromis, et aussi qu’il fallait parler de son travail, le promouvoir, toutes choses pour lesquelles je ne me sentais absolument pas douée. Je n’étais pas du tout prête pour cela, à l’époque. Alors j’ai fait d’autres choses, et surtout j’ai beaucoup voyagé : en France, en Espagne, au Portugal, au Danemark, en Suède...
En 2012, vous vous êtes installée à Barcelone, où vous résidez toujours aujourd’hui...
Pendant mes années d’université, j’étais partie en Erasmus dans une école à Barcelone. J’ai beaucoup aimé la ville, je m’y suis senti très bien accueillie. À Hambourg les gens sont un peu trop réservés pour moi, qui suis d’un naturel expansif. Mais j’aimais bien l’université et puis je vivais dans une grande maison avec des tas de gens, une sorte de communauté. Donc j’y suis retournée et j’ai fini mes études. Mais j’avais fait le projet d’aller ensuite vivre en Espagne. Grâce à un autre programme européen, Léonardo, j’ai pu y retourner pour effectuer un stage en entreprise. En l’occurrence, aux éditions Mamut Comics, qui publient des bandes dessinées pour les enfants, en français, en espagnol et en catalan. Et cette fois je suis restée. J’y vis maintenant avec mon compagnon, qui est Chilien, et notre fille âgée de quatre ans.
Parlons donc un peu de ce livre, À un autre endroit...
C’est vieux pour moi. Je l’ai terminé il y a huit ans. Cela fait loin pour quelqu’un qui en a trente-quatre ! J’ai tellement changé depuis que ça ne me représente plus vraiment.
Sans doute, mais c’est l’unique ouvrage de vous que l’on puisse trouver. C’est l’histoire de Yolande, une jeune femme un peu rebelle, qui voyage en stop, allant de ferme en ferme. Elle fait la connaissance d’un jeune homme, Xavi, et intègre la communauté dans laquelle il vit. Compte tenu de ce que vous avez dit sur vos voyages, je suppose que le livre comporte pas mal d’éléments autobiographiques...
Oui, bien sûr. Ce n’est pas mon histoire, ce qui arrive à Yolande ne m’est pas arrivé, mais je me suis inspirée de mon expérience. Moi aussi, je voyageais de préférence en faisant de l’auto-stop. Je ne peux plus le faire aujourd’hui parce que j’ai un enfant. La vie en communauté aussi s’inspire de ce que j’ai connu. Beaucoup de personnages ont des modèles dans la réalité. Mais je ne voulais pas que le récit soit précisément référencé. C’est d’ailleurs l’une des clés du titre : ne pas localiser l’histoire, ne pas la réduire à un lieu précis.
En France, Mai 68 a été une parenthèse qui s’est assez rapidement refermée. Il semble qu’en Allemagne, elle ait duré beaucoup plus longtemps. On sent cet esprit d’insurrection qui anime vos personnages, en quête d’un mode de vie alternatif...
Oui. Dans les années quatre-vingt, il y avait encore beaucoup de maisons squattées par des groupes de jeunes, même dans les petites villes. C’était lié aux mouvements autonome et anarchiste.
Un autre thème que vous abordez est celui de la spéculation immobilière...
Oui, c’est un problème très aigu à Barcelone, mais dans beaucoup d’autres villes aussi, qui connaissent un fort développement et un phénomène de gentrification.
Le récit est en noir et blanc, mais il est rythmé par des grandes images en couleurs, occupant des doubles pages, qui représentent toujours des immeubles, des constructions...
Oui, c’est une forme de chapitrage. J’aime beaucoup l’architecture, et ces lieux sont liés à l’histoire que je raconte. Mais dans les planches mêmes je représente peu les décors, je me concentre davantage sur les personnages.
L’album dénonce la « fureur de construire »...
J’ai grandi dans une région qui est très moche, car tout a été reconstruit après la guerre, sans aucune considération esthétique. À Hambourg, j’ai été très impressionnée par l’architecture, qui était mieux préservée. J’entretiens une sorte de relation d’amour-haine pour l’environnement urbain, pour les bâtiments... Nous sommes les seuls animaux à nous construire un habitat qui n’est pas adapté à nos nécessités, et je trouve cela fascinant.
Un moment que j’aime beaucoup, c’est ce passage où Yolande coupe les cheveux de Xavi dans un jardin public, et un oiseau vient prendre une mèche pour l’intégrer à son nid...
Ah oui ! La nature est très présente dans cette histoire. L’une des questions que se posent mes personnages c’est : comment peut-on vivre en préservant la nature ?
À la fin du livre, Yolande tourne le dos au bonheur qu’elle semble avoir trouvé auprès de Xavi et de ses amis, pour repartir sur les routes, à la recherche d’un autre endroit. Comme si l’appel du voyage était un absolu, quelque chose de plus fort que tout le reste...
Cette fin n’est pas du tout autobiographique. Dans la même situation, je n’aurais sans doute pas agi comme ça. Mais je vivais alors une relation avec une personne qui n’était pas capable de s’engager, et je crois que c’est ce qui m’a inspiré cette fin. Mais je connais beaucoup de gens qui ont la bougeotte. Depuis que je vis à Barcelone, j’ai vu repartir plein de monde... Les gens sont de plus en plus en capacité d’inventer leur vie, de rebattre les cartes, de choisir où ils veulent s’installer...
Ce n’est pas vrai pour tout le monde. La crise des migrants que connaît l’Europe, et qui est posée de façon particulièrement aiguë en Allemagne, donne à réfléchir. Il y a des gens qui sont bloqués à nos frontières, alors que nous, Européens, avons cette liberté extraordinaire de voyager que nous donne notre passeport...
Oui, absolument. Moi, depuis l’Espagne, je ne vis cela qu’à travers les journaux. Mais je pense que nous devrions tous avoir un droit égal à voyager et à nous installer où nous le souhaitons. On bloque les humains aux frontières alors que les marchandises, celles, circulent librement en quantité toujours croissante !
Dans Orang No.9 [9], j’ai publié une histoire intitulée Grenze [Frontières]. Le thème du numéro était « Atlas », alors j’ai voulu travailler sur cette idée de frontière. J’ai repris la typographie et l’esthétique de l’atlas que nous avions à l’école. Et j’ai divisé mon histoire en trois séquences. Dans l’une d’elles, il est question des frontières qui n’ont pas su arrêter la propagation du nuage radioactif après la catastrophe de Tchernobyl. La troisième histoire est celle d’un camionneur qui sillonne les routes et traverse les frontières pour livrer des pommes. Et je fais parler les pommes elles-mêmes qui s’étonnent qu’on les conduise si loin de chez elles.
Si j’avais une petite critique à formuler s’agissant d’À un autre endroit – que j’aime beaucoup par ailleurs –, c’est que le récit ne me semble pas exempts de certains clichés. Les mamies sont forcément sympathiques, les hommes forcément immatures, les flics forcément brutaux... N’est-ce pas un peu convenu ?
C’est intéressant comme point de vue... Mais il me semble que Xavi est plus mature que Yolande.
En tout cas l’un des personnages féminins déclare que les hommes sont tous immatures...
Oui. C’était l’opinion d’une de mes amies, dont je me suis inspirée. En tout cas je vois moi-même pas mal de défauts à ce livre. Certaines faiblesses narratives... À ma décharge, je devais respecter un délai pour le finir et j’ai dû aller très vite, jusqu’à faire deux ou trois planches par jour, sur la fin. Je ne savais pas clairement comment j’allais terminer l’histoire.
En dehors de ce premier album, on vous a vue au sommaire de revues et d’anthologies comme Nobrow, Colibri, Strapazin, Kuš, Orang, Kuti et Solo Perras... Vous n’avez pas participé à Spring, cette revue de BD allemande animée par un collectif de dessinatrices ?
Non. Elles sont un peu plus âgées que moi, je ne les connais pas très bien et elles ne m’ont jamais sollicitée. En revanche, depuis janvier 2017 j’ai produit une demi-douzaine d’histoires courtes (entre 5 et 8 pages) pour le magazine nord-américain en ligne Vice.
Vous avez aussi pratiqué l’autoédition, en faisant imprimer plusieurs petits albums, dont, en 2017, le dernier en date, qui a pour titre Wood...
Plusieurs de ces livres ne relèvent pas à proprement parler de la bande dessinée, mais contiennent des dessins avec du texte. D’autres sont des BD. Les premiers, je ne voyais pas quel éditeur aurait pu les publier, mais j’avais tout de même envie de les partager.
Wood, je l’ai fait en Lituanie, en trois semaines. J’étais invitée à Kaunas, pour une résidence dans un atelier de risographie, Kitokia Grafika. J’ai dessiné l’histoire d’une petite fille qui rencontre un loup dans la forêt. On m’a fait remarquer par après que ça ressemblait beaucoup au Petit Chaperon rouge, et le plus fort, c’est que je n’y avais absolument pas pensé. Mais on voit aussi dans l’histoire des personnages – les créatures du bois – avec des costumes étranges inspirés du folklore lithuanien.
Dans les histoires récentes, vous avez abandonné les bulles en forme de gouttes que l’on pouvait observer dans À un autre endroit, au profit de bulles horizontales plus régulières.
Oui, depuis des années. Ça facilite l’écriture...
Vous avez suffisamment de matière pour publier un recueil de vos histoires courtes...
C’est prévu : le livre va sortir à l’automne chez Apa Apa Comics [10], un éditeur indépendant installé à Barcelone depuis une dizaine d’années, qui fait de très beaux albums.
À Barcelone, vous donnez des cours de bande dessinée, je crois...
Oui, quelquefois. J’anime des ateliers lors d’événements liés à la bande dessinée, au livre, à l’illustration. Avec des librairies, aussi ; et dans un lieu qui s’appelle le Centro Civic [11]. Cela s’adresse tant aux enfants qu’aux adolescents ou aux adultes.
Vous avez une autre activité rémunératrice ?
Pendant plus de trois ans, jusqu’en février de cette année, j’ai travaillé dans une boutique qui louait des vélos. Ça me permettait de pratiquer les langues étrangères avec les touristes.
Ici à Angoulême, pendant votre résidence à la Maison des Auteurs, vous développez un projet qui a pour titre de travail Cercles, et qui sera votre prochain roman graphique. Vous annoncez au moins 120 pages...
Ce n’est encore qu’une estimation. Mon sujet, c’est le concept de liberté. Je l’aborde à travers des cercles concentriques. Au centre, il y a une femme d’une trentaine d’années, en cellule d’isolement dans une prison où elle purge une peine pour avoir milité dans une association écologiste et avoir participé à un attentat contre une entreprise d’extraction pétrolière. Les deux autres personnages principaux sont le frère de cette femme (qui évolue dans le cercle de la vie urbaine, dans une grande métropole qui pourrait être São Paulo), et un ami anthropologue (c’est le cercle des petites communautés rurales). Bien que le récit ne soit pas explicitement situé quelque part, je m’inspire beaucoup de la communauté des Mapuche, au Chili, qui est en conflit avec le gouvernement central, car j’ai un ami qui a étudié le sujet et je m’appuie sur son travail. Dans tous les pays d’Amérique latine, les peuples indigènes sont exploités et sacrifiés sur l’autel du développement économique, de la déforestation, des grandes infrastructures.
Pourquoi avez-vous choisi ce thème de la liberté ?
Parce que je milite contre les prisons, dont je désapprouve l’existence. J’essaie de contribuer à éveiller les consciences sur le sujet. J’ai participé à beaucoup de manifestations devant des prisons, en Allemagne et en Espagne.
Le scénario est complètement écrit ou bien vous vous laissez une part d’improvisation ?
Il est assez écrit, parce que je voulais avoir des idées claires avant de commencer à dessiner. Je réfléchis à cette histoire depuis des années. Mais, cette fois encore, je laisse la fin ouverte. À force de les fréquenter, mes personnages acquièrent une vie propre et je veux voir où ils voudront me mener.
Les personnages s’écrivent des lettres, si j’ai bien compris ?
Le frère et l’ami adressent des lettres à la femme qui est en prison, et lui confient des choses très intimes, un peu comme des monologues intérieurs. Ils ne savent pas si leurs lettres lui parviennent. Elle-même n’est pas autorisée à écrire, donc les chapitres centrés sur elle suivront plutôt le cours de ses pensées, de ses rêves.
Et visuellement, quels codes avez-vous adoptés ?
Je vais redessiner les quelques pages que j’avais déjà réalisées avant d’entamer ma résidence. Le livre devrait être en deux couleurs, mais la deuxième changera d’un chapitre à l’autre.
Eh bien nous avons hâte de découvrir Cercles et votre anthologie de récits complets. Merci Marlene.
(Propos recueillis par Thierry Groensteen à la Maison des Auteurs le 23 mai 2018.)
[1] Pierre l’ébouriffé.
[2] Née en 1963 à Berlin-Est, Anke Feuchtenberger a été publiée en France à l’Association et chez Frémok. On connaît principalement le cycle de La Putain P, sur scénario de Katrin de Vries.
[3] Né à Bologne en 1966, Stefano Ricci vit à Hambourg depuis 2003 et est le mari de Anke Feuchtenberger. Illustrateur, il est l’auteur d’une dizaine d’albums de bande dessinée et collabore aussi fréquemment avec le monde du spectacle.
[4] Né en 1963, Martin tom Dieck a été publié en France au Seuil, à l’Association et chez Frémok.
[5] Cofondatrice d’un festival d’édition graphique et de bande dessinée à Leipzig.
[6] Auteur de La Ronde, chez Cambourakis, en 2012.
[7] Kati Rickenbach est notamment l’autrice de Jetzt kommt später chez Edition Moderne, 2012, traduit par L’Agrume en 2014 sous le titre Demain commence aujourd’hui.
[8] Originaire de Hartlepool, il est l’auteur de Klaus chez Breakdwon Press et Nobrow.
[9] Orang est une revue – initialement un fanzine – créée à Hambourg par Sascha Hommer, Line Hoven, Till D. Thomas et Arne Bellstorf, qui a connu dix numéros.
[11] Maison de quartier où sont dispensés toutes sortes de cours.